Erasmus+ : Retour sur l’événement Inter-species Assembly à Berlin

Erasmus+ : Retour sur l’événement Inter-species Assembly à Berlin

Octobre 2024

Du 16 au 20 octobre 2024, 7 étudiant.es en Master de Communication et de Design se sont rendus à Berlin avec Benoît Verjat, enseignant, dans le cadre du séminaire de recherche « Acclimatements » qu’il anime. Ils y ont participé à une « Inter-species assembly » initiée par Floating Berlin, avec des étudiant.es de Frankfurt Städelschule et de la HEAR Mulhouse.
Ils nous livrent ici leur témoignage collectif sur cette expérience pour laquelle ils ont bénéficié de bourses de mobilité Erasmus+.

Collectifs, spectre des écologies sociales et culturelles

En tant que groupe, nous avons visité un large éventail d’initiatives et d’institutions autour de Berlin, chacune offrant une perspective unique sur la nature-culture et les nombreux types de cohabitation avec leur environnement et leur contexte social. 

La base de Spore Initiative à Neukölln est un espace autonome, financé par la philanthropie, qui facilite les projets culturels à l’intersection de la justice climatique, de la régénération écologique et de l’éducation, en dialogue avec les protecteurs de la terre dans le Sud et le Nord du monde. Au coin de la rue, Prinzessinnengarten Kollektiv est un projet communautaire de jardin urbain à Berlin, installé dans un ancien cimetière, qui promeut un mode de vie durable, l’agriculture urbaine et l’éducation à l’environnement.

À côté de l’Alexander Platz, Haus der Materialisierung est un espace de collaboration qui rassemble diverses initiatives axées sur le recyclage, la réutilisation des matériaux et la conception écologique, favorisant une approche communautaire de la production et de la vie durables.

Dans le sud-est de la ville, le Spreepark Berlin est un ancien parc d’attractions de la RDA en cours de revitalisation en tant qu’espace culturel public. Le parc mêle attractions désuètes abandonnées, installations artistiques récentes et événements axés sur la nature. Le développement du nouveau parc, ainsi que du Tempelhofer Feld, est organisé par Grün Berlin. 

Le Tempelhofer Feld est un vaste parc public situé sur les terrains d’un ancien aéroport, offrant de vastes espaces de détente et de loisirs. 

L’eau du toit de l’ancien aéroport s’écoule sous la rue Columbiadamm dans le bassin de collecte des eaux de pluie, où se trouve l’Université flottante de Berlin, qui accueille l’assemblée. Floating est un espace unique où un environnement créé par l’homme a été récupéré par la nature, créant une « culture de la nature » (Haraway) où les plantes, les animaux et les algues prospèrent au milieu d’une eau polluée. Cette coexistence d’éléments naturels et artificiels forme ce que Gilles Clément appellerait un « troisième paysage », mêlant la régénération écologique à la présence relativement récente de l’université, favorisant une interaction dynamique entre les humains et leur environnement.

Nous avons également été guidés dans l’exposition de Rirkrit Tiravanija au Gropius Bau, qui présente l’art interactif et participatif de l’artiste, qui brouille les frontières entre le spectateur et le créateur. Connu pour ses expériences communautaires, le travail de Tiravanija invite le public à s’engager directement dans les installations, transformant l’espace d’exposition en une plateforme d’interaction sociale et de moments partagés. 

Nous avons participé à des pratiques artistiques et transformatrices telles que le cosmogramme avec le philosophe Patrick Degeorges, qui consiste à créer des diagrammes symboliques représentant les relations entre l’homme et l’environnement dans un lieu spécifique, ou encore la « Forêt de la mauvaise conscience » de l’artiste Andreas Greiner, qui plante des arbres sous la forme d’une « sculpture vivante » pour compenser les émissions de CO2, en soulignant les tensions entre l’industrialisation, la déforestation et le potentiel de renouveau écologique.

Espace de pratique 

Chaque matin, notre journée commençait par des pratiques corporelles guidées par les chorégraphes Sabine Zahn, Ghyslaine Gau ou Lea Martini, explorant le site par le mouvement et produisant une dynamique de groupe. Nous nous sommes mêlés à des habitué.es de ces séances de pratique collective appelées « Space for Practice (S4P) ». S4P propose une pratique régulière du mouvement dans les conditions uniques et changeantes du bassin de rétention des eaux de pluie de Floating. Tout en proposant des sessions de mouvements basées sur leurs centres d’intérêts actuels, les praticien.nes qui guident le groupe s’inspirent également des impulsions des autres, tissant de nouvelles pratiques ensemble. 

Rencontres et pollinisation croisée

Pendant ce séjour de cinq jours à Berlin, des étudiant.es de trois institutions différentes – la HEAR Mulhouse, la Städelschule de Francfort et l’ENSAD Nancy – se sont réunis pour s’engager dans une expérience commune. Chaque groupe a apporté sa propre perspective à cette collaboration : 

HEAR Mulhouse 
L’option Design Réhabitant explore le croisement des territoires urbains et ruraux, à la fois artificiels et naturels, institutionnalisés et auto-initiés, mécanisés et low-tech. Elle promeut la culture collective et le travail participatif, en mettant l’accent sur la prise de conscience des changements d’état, la valeur de la « fabrication » et le potentiel énergétique et économique de divers écosystèmes vivants et artificiels. 

Städelschule de Francfort 
À la Städelschule, la notion de cohabitation s’étend au-delà des interactions humaines pour inclure toutes les espèces vivantes. Son approche intègre la recherche sur la performance et la renégociation des espaces partagés, la communication entre les espèces, et le développement de nouveaux langages et formats pour articuler ces expériences. 

ENSAD Nancy 
A travers le séminaire Acclimatements, l’ENSAD Nancy encourage les étudiant.es à s’engager et à transformer les lieux à travers une approche interdisciplinaire. Le thème de cette année se concentre sur l’eau, explorée à travers le prisme des écotones, zones de transition entre les écosystèmes. L’objectif est de faire l’expérience des lieux par une présence active, plutôt que de simplement cataloguer leurs caractéristiques.

Ce rassemblement nous a donné l’occasion de cohabiter, de nous immerger dans le lieu et d’en prendre la responsabilité en nous engageant dans des tâches telles que le nettoyage, l’organisation de l’espace, la découverte des voisins et même quelques petits travaux d’entretien. Ces activités pratiques ont favorisé l’émergence d’un sentiment de communauté. Chaque soir, nous nous réunissions pour cuisiner et partager les repas, transformant ces moments en de riches occasions de réfléchir sur la journée, en approfondissant notre compréhension du lieu dans lequel nous nous trouvions. Et accueillir les contributions des invité.es, dont Lea Martini, Ghyslaine Gau, Sabine Zahn, Andreas Greiner, Antonia Alampi, Valeria Fahrenkrog et Patrick Degeorges.

Par Benoît Verjat, avec Ange Billard, Clare Boisramé, Hugo Canu, Christine Delatte, Sam Droual, Amandine Mourey, Iris Rachez.